« L’agrément « Vacances Adaptées Organisées » (VAO) est accordé par le représentant de l’État [et] vise à assurer aux personnes handicapées, qui choisissent des séjours de vacances collectifs, des conditions de sécurité adaptées, ainsi qu’une qualité de l’accueil et de l’accompagnement. » Les familles de la dizaine de vacanciers handicapés mentaux qui sont morts le 9 août dernier dans l’incendie du gîte de groupe La petite Venise, à Wintzenheim (Haut-Rhin), comptaient sur ces « conditions de sécurité adaptées » pour que leurs proches passent d’agréables vacances. Or, les premières informations diffusées après le drame montrent que cet agrément n’apporte aucune garantie de sécurité.

Sur le papier, les conditions à remplir pour l’obtenir semblent pourtant drastiques. Mais en fait, les textes réglementaires n’exigent pas que les organisateurs de vacances adaptées s’assurent de la conformité à la réglementation en vigueur du lieu d’hébergement. Or, dans ce sinistre on a appris successivement que le gîte était une ancienne grange à pans de bois dont l’intérieur rénové était lui-même en bois, qu’il n’était pas conforme aux règles de sécurité incendie d’un Établissement Recevant du Public (portes coupe-feu, évacuation de fumée, alarme, extincteurs, etc.), que la commission de sécurité ne l’avait jamais inspecté puisqu’il restait déclaré en mairie comme bâtiment agricole. Toutes les victimes logeaient à l’étage dont les seules ouvertures consistaient en des fenêtres de toit élevées de type Velux empêchant toute fuite alors que le bâtiment s’est très rapidement embrasé. Pourtant, malgré son obligation de « conditions de sécurité adaptées » l’organisme agréé VAO Oxygène a loué un tel gîte. Son slogan : « Ensemble, nous transformons votre projet en séjour unique ! » Sans commentaire…

Un seul organisme, un cas isolé ? Non : le bâtiment comportait au rez-de-chaussée un second gîte, La petite Alsace, loué par une autre association, Idoine, agréée VAO ; son groupe de vacanciers est sorti indemne de l’incendie. Mais voilà que ce second organisme est cité le 20 août lors de la fermeture par arrêté préfectoral d’un autre gîte de groupe appartenant à la commune de Larians-et-Munans (Haute-Saône) ; là, le système de sécurité incendie ne fonctionne pas et les vérifications techniques obligatoires annuelles ou biannuelles n’ont pas été réalisées, le groupe de vacanciers handicapés moteurs a été évacué illico.

L’enquête judiciaire devra déterminer les responsabilités des différents protagonistes du drame de Wintzenheim; à ce jour personne n’est mis en examen. Mais déjà la « solidité » de l’agrément VAO est mise en cause, notamment du fait des lacunes de son contenu qui les réduit à une simple formalité administrative. Les ministres chargées des Personnes handicapées ont missionné l’Inspection Générale des Affaires Sociales « pour contribuer à comprendre les causes et responsabilités dans le tragique incendie de Wintzenheim, survenu le mercredi 9 août 2023 [La mission] vise à contrôler les conditions d’autorisation et d’organisation de ce séjour et vérifier son cadre administratif auprès des organismes de voyages concernés. Cette inspection permettra d’identifier, le cas échéant, des manquements et de formuler des recommandations. » Ses hauts-fonctionnaires devront également expliquer comment l’organisme Oxygène a obtenu le 7 juillet un agrément préfectoral temporaire VAO pour la seule période du 8 juillet 2023 au 31 août 2023. L’organisme avait-il vendu ses séjours à 2.700€ par personne dans le gîte de Wintzenheim alors qu’il ne disposait pas de l’agrément obligatoire ? Le représentant de l’État aurait-il couvert une pratique illégale ?

Il ressort des informations publiées depuis la mort tragique de dix vacanciers handicapés et d’un animateur que des organismes agréés VAO prennent des libertés avec leur obligation de sécurité. Le quotidien Nord Littoral épinglait même le 17 août une société opérant sans agrément. Il est grand temps que le public soit informé de la réalité de l’organisation de séjours de vacances adaptées, pour que ces temps de plaisir et de repos ne s’achèvent plus au cimetière.

Laurent Lejard, septembre 2023.

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